Éducation

Les albinos ont des pouvoirs magiques : une croyance fausse et dangereuse

Le mythe selon lequel les personnes atteintes d’albinisme possèdent des pouvoirs magiques est non seulement faux, mais également à l’origine de nombreuses persécutions. Présente dans plusieurs pays d’Afrique subsaharienne, cette superstition continue de nourrir des violences inacceptables. Décryptage d’un phénomène qui exige une réponse collective urgente.

Une idée reçue profondément enracinée

Dans certaines régions d’Afrique, notamment en Tanzanie, au Malawi ou au Burundi, l’albinisme est entouré de nombreuses croyances irrationnelles. L’une des plus répandues veut que les albinos détiennent des pouvoirs surnaturels. Certains pensent que leurs os apportent chance, richesse ou succès lorsqu’ils sont utilisés dans des rituels. D’autres vont jusqu’à croire que le simple contact avec une personne albinos peut guérir une maladie ou attirer la prospérité.

Cette vision mystique de l’albinisme n’a aucun fondement scientifique ni rationnel. Elle repose sur des légendes ancestrales et des traditions ésotériques, souvent transmises oralement, sans remise en question. Pourtant, ces mythes ont des conséquences dramatiques dans la vie des personnes concernées.

L’albinisme, une réalité médicale

Contrairement aux idées reçues, l’albinisme n’est pas un phénomène mystérieux. Il s’agit d’une maladie génétique rare, caractérisée par une absence partielle ou totale de mélanine, le pigment responsable de la couleur de la peau, des cheveux et des yeux. Cette condition affecte également la vue, rendant les personnes albinos plus vulnérables à la lumière du soleil et aux troubles oculaires.

L’albinisme ne confère donc aucun pouvoir magique. Il n’est ni une bénédiction, ni une malédiction. C’est une particularité génétique que l’on retrouve dans toutes les populations du monde, bien qu’elle soit plus visible dans certaines régions d’Afrique en raison du contraste de peau.

Les conséquences tragiques du mythe

Les conséquences de cette croyance sont lourdes. En Tanzanie, plus de 75 albinos ont été tués entre 2000 et 2015 selon les données d’Amnesty International. Les corps sont souvent mutilés : bras, jambes, cheveux, organes génitaux sont prélevés pour être utilisés dans des rituels occultes. Certains sorciers ou guérisseurs les vendent à prix d’or à des clients en quête de richesse ou de protection surnaturelle.

Image illustrative des rites
Image illustrative des rites

Les enfants albinos sont particulièrement ciblés. Beaucoup doivent être retirés de leurs villages et placés dans des centres protégés. D’autres grandissent dans la peur, exposés à l’exclusion sociale, à la stigmatisation à l’école et aux moqueries quotidiennes. Le mythe alimente donc une double peine : celle de la différence physique, et celle de la mise en danger permanente. Lire : Rapport 2015/16

Une atteinte grave aux droits humains

Ces persécutions constituent une violation flagrante des droits fondamentaux. Le droit à la vie, à la sécurité, à la santé, à l’éducation et à l’égalité sont quotidiennement bafoués pour les personnes atteintes d’albinisme. L’ONU a d’ailleurs reconnu cette situation en 2015 en instaurant la Journée internationale de sensibilisation à l’albinisme, célébrée chaque 13 juin.

Le Haut-Commissariat aux droits de l’homme des Nations Unies appelle à une tolérance zéro face aux crimes rituels. De nombreux États africains ont commencé à durcir leur législation pour lutter contre ces violences. Mais la route reste longue, car la loi seule ne suffit pas à déconstruire des croyances culturelles profondément ancrées.

L’importance de l’éducation et de la sensibilisation

Lutter contre ce mythe dangereux passe nécessairement par l’éducation. Il est crucial de sensibiliser les populations, notamment rurales, sur la réalité scientifique de l’albinisme. Les campagnes d’information, les interventions dans les écoles, les messages radios ou télévisés peuvent aider à faire évoluer les mentalités.

Plusieurs ONG comme Under The Same Sun, Standing Voice ou encore la Fondation Pierre Fabre œuvrent au quotidien pour la défense des droits des albinos. Elles organisent des ateliers, distribuent des crèmes solaires, fournissent des lunettes correctrices, et accompagnent les familles. Leur travail permet non seulement d’améliorer les conditions de vie des personnes albinos, mais aussi de briser les tabous.

Témoignages et modèles inspirants

Heureusement, des voix s’élèvent pour montrer une autre image de l’albinisme. En Tanzanie, la députée Al-Shymaa Kway-Geer, elle-même albinos, a fait de la défense des droits de ses pairs un combat politique. Des mannequins, artistes et activistes albinos prennent aussi la parole sur les réseaux sociaux pour revendiquer leur identité et déconstruire les clichés.

Ces témoignages contribuent à redonner dignité et confiance à des milliers de personnes encore invisibilisées. Ils prouvent que l’albinisme n’est pas un handicap social ou une malédiction, mais une richesse humaine à respecter.

 

Conclusion : une responsabilité collective

Affirmer que les albinos ont des pouvoirs magiques est une croyance infondée et dangereuse. Elle nourrit la peur, l’ignorance, la haine, et justifie des actes d’une violence inacceptable. Il est de notre responsabilité à tous journalistes, enseignants, leaders religieux, autorités publiques et citoyens de déconstruire ce mythe et de faire de l’albinisme une différence reconnue, protégée et valorisée.

Changer les mentalités commence par un mot, une action, un regard. L’albinisme n’est pas magique : il est humain.

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